Réconciliation nationale au Tchad: les catholiques tracent les voies à Idriss Deby
Dans un contexte politique marqué par une grande misère et la répétition de
guerres civiles depuis trente ans, le souci de concorde n’est pas seulement un principe éducatif, une bonne intention pour jeunes filles ayant la chance de fréquenter une école privée. C’est ici
une manière de préparer l’avenir et de répondre directement au thème de la seconde assemblée spéciale du Synode des évêques pour l’Afrique, qui s’est tenue à Rome il y a neuf mois : « L’Église en
Afrique, au service de la réconciliation, de la justice et de la paix. »
Les catholiques du Tchad tracent des voies de réconciliation
Le thème du dernier Synode des évêques pour l’Afrique, invitant à construire la paix, a trouvé un écho tout particulier au Tchad, même si les
efforts des communautés chrétiennes restent sans grand effet aux sommets de l’État
Dans un contexte politique marqué par une grande misère et la répétition de guerres civiles depuis trente ans, le souci de concorde n’est pas seulement un principe éducatif, une bonne intention pour jeunes filles ayant la chance de fréquenter une école privée. C’est ici une manière de préparer l’avenir et de répondre directement au thème de la seconde assemblée spéciale du Synode des évêques pour l’Afrique, qui s’est tenue à Rome il y a neuf mois : « L’Église en Afrique, au service de la réconciliation, de la justice et de la paix. »
Un comité Justice et Paix du collège, chargé de résoudre les conflits du quotidien, des « villages de la paix » qui ont également vu le jour dans les classes : ces initiatives ne sont-elles pas dérisoires pour enrayer les maux qui affectent leur pays ? « Nous ne sommes pas sûres que cela va changer grand-chose, reconnaît Sœur Marthe, religieuse de l’Assomption. Mais les élèves qui passent ici auront été amenées à vivre de grandes choses, cela les incitera à les reproduire à plus grande échelle. »
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Révolution culturelle
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Les réunions, qui se déroulent le mercredi, permettent d’échanger librement sur la vie des uns et des autres, de réfléchir sur des textes et de prier ensemble. « Il fallait dépasser le mur des ethnies et surmonter les ressentiments claniques », souligne le P. Paolino Tipo, coordinateur de la commission Justice et Paix pour le diocèse de N’Djamena.
Mais, très vite, des obstacles sont apparus : « Beaucoup de fidèles m’ont demandé comment ils allaient faire pour chanter à la messe dans une autre langue que la leur. J’ai répondu qu’au marché, ils parvenaient bien à communiquer tous ensemble. » Dans sa paroisse Notre-Dame-de-La-Trinité du quartier de Sao, qui regroupe 14 communautés, le P. Paolino Tipo s’est appuyé sur les laïcs pour inviter à la prière commune.
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« Vivre un modèle de cohabitation pacifique »
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Marie, censeur dans un lycée et elle aussi responsable d’une communauté ecclésiale de base, partage ce sentiment de « vivre un modèle de cohabitation pacifique ». Elle est bien consciente toutefois que « la paix se vit d’abord à l’intérieur de nos maisons, dans les relations familiales comme dans l’attention aux plus pauvres. » Vient ensuite le temps de la pratique religieuse, de la célébration de la messe, qui fournit l’occasion de trouver un « langage commun ». Désormais, les paroles de l’office sont prononcées alternativement en français, en sara et en gambaye.
Mais qu’en est-il de l’engagement politique des chrétiens dans la société tchadienne pour atteindre l’objectif de paix et de réconciliation exprimé par les Pères du Synode ? « En janvier et février, nous avons travaillé tous ensemble sur le texte du message final. C’est une première étape, qui nous permet d’interpeller les politiques sur ce qu’ils doivent faire », plaident Augustine et Marie.
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Quel impact?
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Responsable du Cefod, tout à la fois centre de documentation spécialisé dans les sciences humaines et institut et de formation pour cadres d’entreprise, le jésuite tchadien Antoine Berilengar, 45 ans, regrette ainsi le manque d’implication directe des autorités catholiques dans le gouvernement du pays.
Il reste mitigé sur l’efficacité de l’assemblée spéciale du Synode des évêques pour l’Afrique. « À quoi cela sert-il, sinon à chanter, prier et réfléchir ensemble ? De toute façon, les travaux n’ont pas été préparés sérieusement, puisque les documents n’avaient pas été envoyés à temps aux Églises locales », tonne-t-il, en rappelant les résultats décevants du premier Synode, en 1994.
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Le numéro de téléphone du président Idriss Déby...
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Au collège Notre-Dame-de-l’Assomption de N’Djamena, Dalida, Florence et Bellinda se rêvent déjà magistrate, chef d’entreprise ou cardiologue. De leur capacité à s’imaginer, en outre, un destin politique dépend peut-être une partie de l’avenir du Tchad. Pour que les rêves de réconciliation, de paix et de justice portés par les catholiques s’inscrivent au plus haut sommet de l’État.
Bruno BOUVET, à N'Djamena