Que cesse enfin l'imposture au Tchad !
Depuis 1996, à intervalle quinquennal, un rituel de l’imposture s’impose aux Tchadiens. Il s’agit de l’investiture de l’imposteur Idriss DébyItno, vainqueur sans gloire des farces électorales à répétition que les Institutions dites démocratiques sans once de dignité installent au pouvoir dans l’indifférence et dans le mépris du vouloir populaire au changement. En vingt (20) ans de démocratie clé en main, Idriss a eu l’habileté et l’outrecuidance de passer du statut de canonnier chef de Guerre à un Chef monarchique d’un Tchad encore République, non sans avoir mis hors course dans une espèce de « KO » pugiliste tous ses adversaires politiques. La dictature est ambitieuse d’une longévité et voluptueuse du mépris. Pourquoi s’arrêter alors en si bon chemin ?Un rapide coup de tournevis à la constitution sous l’œil bienveillant d’une France mafieuse à jamais installée aux commandes d’un empire tentaculaire et bientôt séculier, la tristement célèbre « Francafrique » lui a suffi pour s’offrir l’éternité et perpétuer à l’infinie la partie de la honte. La dictature est ambitieuse disais-je, mais ces deux dernières années, elle se donne aussi un visage orgueilleux et une prétention à friser la provocation.En effet, à coup de matraquage médiatique, elle ose nous vendre un soi-disant bilan d’un mandat dit social du Chef de l’Etat. Mais de quel bilan nous parle-ton ? Quel social s’agit-il ? Décidemment, l’imposture se croit tout permis, tant, en face d’elle le répondant se fait attendre. C’est qu’en plus de l’indicible imposture, l’indignité s’est imposée désormais comme une référence dans notre pays.
Il convient de revisiter, à la veille de la fête qui se profile dans ce Tchad assiégé, ce qui est fièrement exposé dans les médias comme actifs d’unbilan de clôture d’un mandat de 5 ans d’un Idriss Déby plus que jamais prophète aux commandes de notre pays. Disons tout de suite que nous n’avons pas une vision restrictive du bilan du régiqueDébyique comme le font croire ses obligés. En effet, déby n’est pas au pouvoir il y a seulement quatre ans. Et donc c’est sur toute la durée de son règne que faire son bilan se justifie et a de sens.
De sa prise de pouvoir par les armes en 1990 et de l’espoir d’une vie politique enfin démocratisée qu’elle avait suscité, il n’en reste plus qu’un lointain souvenir. Lointain souvenir car dès l’aube de ce coup d’Etat toléré et accepté par le peuple qui n’en pouvait plus du habréisme, notre marche a pris très vite des tournures cauchemardesques : assassinats politiques, gabegie et prévarication dans la gestion de la chose publique, gouvernance économique et politique médiocres, exclusion et préférence ethnique comme mode de redistribution de pouvoirs dans l’administration et au sein des forces de défense et de sécurité, etc. La démocratie, l’alibi principal, a été refoulée dans les grottes d’Amdjarass dans l’Ennedi natal du despote tchadien.
Et pourtant en 1993, sous l’instigation de la société civile tchadienne et de la pression internationale, le régime militaro-ethnique de Deby avait consenti à l’organisation de la Conférence Nationale Souveraine devant jeter les bases de la démocratie tchadienne et de la refondation de notre Nation. Malheureusement, le président s’est ingénu à torpiller tous les acquis issus de ladite Conférence, n’en retenant simplement qu’une assise de légitimation de son pouvoir. En bon stratège militaire (paraît-il), il s’est installé dans la manipulation politicienne avec l’aide d’une classe politique incompétente et corrompue.Un mariaged’intérêts entre ces politiciens véreux fut conclu sous une dénomination « Démocratie Consensuelle et Participative (DCP) ». Heureusement cette volonté d’escamotage de la démocratie a fait long feu, et la DCP a implosé à cause tout naturellement de son handicap congénital.Toutefois, ce passage marque encore de ses séquelles la vie politique nationale. Par ricochet, la démocratie tchadienne naissante rate son départ à cause de l’appétence matérielle égoïste des politiciens imposteurs.
De ce faux départ, il s’en est suivi l’agonie. Deby en a profité pour rempiler les mandats électifs à coup de fraudes et de théâtralisation de la compétition électorale. La parenthèse sanglante soudainement ouverte par les rébellions armées en 2006 et 2008 s’est refermé depuis lors. Deby a dû puiser à fonds sur les revenus pétroliers pour sauver son fauteuil. Depuis lors, il montre le visage d’un régime requinqué par cette victoire militaire et ose faire rêver. Il exhibe à cet effet avec ostentations quelques pâles infrastructures réalisées comme la moisson de vingt ans de saisons agricoles et éléments de propagande politique. Ce qu’on nous ne dit pas, c’est que le peuple a vécu 18 années de disettes entre temps. De plus, le régime croit tenir ces réalisations frappe l’œil comme preuves tangibles au crédit d’un pseudo mandat social. Il s’autorise à donner à ce mince succès un écho retentissant insoupçonné. C’est le propre des perdants, faire du bruit pour un menu fretin engrangé. A la Télé Tchad, les images tournent en boucle. Et du côté du MPS, la prétention est à son comble tandis que la fierté de ce Tchad version Déby est poussée à l’extrême. Dans cette ferveur, l’on semble oublier cette constance, un bilan positif ça s’impose à tout le monde comme réalité tangible, alors point besoin d’être courtisan pour le reconnaître. Entres partisans du régime et les autres tchadiens, il y a qui pro quo s’agissant du bilan du quinquennat social. Forcément !
En effet, peut-on parler d’un bilan social positif à partir d’une politique d’une invariance notoire depuis 20 ans ? Qu’on ne se méprenne pas. Le Tchad de 2011 est différent, au plan infrastructurel, de celui d’il y a deux, cinq, voire 10 ans. Mais le mérite de cette situation ne tient pas uniquement du bon vouloir du président Deby. Et donc, une posture comparative qui ne se résume qu’à présenter ces réalisation- masques, n’appréhende le bilan du quinquennat social que partiellement d’autant plus quecelles-ci (réalisations), d’ailleurs, mal orientées pour la plupart, apparaissent comme d’infime éclaircit dans le gros trou noir des échecs du régime. Tout au plus, elles ne sont qu’une facette flatteuse d’un bilan squelettique et maigrichon de 20 ans de règne.
Raisonnablement, peut-onparler de réussite d’une politique sociale sans que celle-ci ne mette au cœur de ses priorités, le corps social lui-même ?En cela, il faut réfuter ce mensonge communicationnel tendant à déformer les vrais résultats du mandat dit social du Président Déby, pour une bonne et simple raison qu’aucune réussite au plan social n’est pertinent sans investissement sur les individus qui composent la société. Autrement dit, le régime devrait promouvoir la réconciliation entre les citoyens, l’acceptation des uns par les autres et vice versa, à la faveur de l’instauration d’une politique républicaine de justice et d’équité sociale qui combatte les replis identitaires, les promotions sociales et professionnelles sur des bases subjectives (préférence ethnique, religieuse ou régionale). Or il n’en est rien, sinon pas grand-chose au cours du quinquennat finissant. C’est bien beau de construire les routes, bâtir des maisons et ériger des châteaux par ci par là,encore faut-il que les citoyens, acteurs sociaux essentiels, cultivent le vivre ensemble et vivent une paix sincère. C’est encore un échec si des composantes importantes de la nation, se sentent léser, délaisser ou estiment ne pas bénéficier équitablement des richesses du pays, voire qu’elles sont recluses à la seconde zone et exclues de la gestion de la chose publique. Alors donc de cette énumération ci-dessus, qui oserait lever le doigt et dire qu’il y eu des avancées ? Sauf cécité intellectuelle et posture partisane outrageante, nul tchadien honnête ne saurait disserter ici sur l’échec patent du régime Deby dans la reconstruction du tissu social. Cette contreperformance, et c’est l’euphémisme, n’est guère surprenant d’autant plus qu’en vingt ans de pouvoir, Deby n’a pas su opérer sa mue de Chef guerre et d’héritier du FROLINAT, en un véritable Chef d’Etat.
De tout ce qui précède, il apparaît que l’intégration nationale reste le tendon d’Achille du régime anachronique et décadent installé depuis vingt ans au bord du Chari. Cette réalité est d’implacabilité forte et nul ne saurait la remettre en cause, surtout avec un argumentaire chétif, à l’instar des scènes de communication teintées d’arrogance et d’intimidations où les pontes du pouvoir s’emploient à rompre leurs cordes vocales dans le but de donner, sans scrupules, des contrevérités à la consommation du peuple, au nom d’un simulacre de bilan dit du quinquennat social.
Du concret ! Pour ce qui concerne le nouveau mandat qui s’ouvre, il est impérieux que les courtisans MPS communiquent dès maintenant sur les objectifs que Deby veut atteindre dans le cadre du développement rural annoncé, notamment en matière de création d’emplois, de l’accroissement des revenus des ruraux, du volume des investissements nécessaires etc. En fait, que nos piètres gouvernants nous disent combien coûtera au Trésor Public l’ambitieux programme du sultan d’Amdjarass. Il s’agit de s’entendre sur des repères afin d’éviter des polémiques ultérieures stériles, car le chiffrage de l’ensemble des projets à réalisés assortis d’objectifs visés, constituera des références sûres pour les futures évaluations du mandat de IDI. N’en déplaise à ceux qui cultivent de la phobie pour une démarche qui se veut comptable. Lorsqu’on adopte la démarche bilan, il faut nécessairement accepter le langage de la vérité, c’est-à-dire, celui des chiffres.Les communicateurs de Deby ont intérêt à s’y résoudre s’ils veulent convaincre les tchadiens. Le contraire ne serait que de la communication démagogique pure et fuite en avant perpétuelle.
Va-t-on s’assagir enfin autour de Deby ?
Rachid Aldelbassit SALAH