Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Alerte Info: Les autorités tchadiennes doivent s'investir pour assurer la sécurité des populations et garantir la paix civile à tous //

Archives

Publié par Mak

 

u1_cfa.jpg

 

La dévaluation du FCFA est elle une panacée ?

 

Depuis quelque temps, des rumeurs persistantes font état d’une deuxième ou troisième dévaluation du FCFA mais au fait, qu’elles soient fondées ou non ces rumeurs, posons nous la question de savoir si la dévaluation du FCFA est une solution aux problèmes économiques des pays de la zone franc.

D’abord qu’est ce qu’une dévaluation ? elle est une opération qui consiste à diminuer la valeur d’une monnaie donnée (ici CFA) par rapport à une autre monnaie (Euro, par exemple) entre lesquelles, il existe un rapport fixe. En d’autre termes,  si 1 Euro= 655,957 FCFA aujourd’hui et que les pays de la zone CFA envisagent de diminuer de moitié le 01 janvier 2012, le rapport deviendra alors I Euro= 2 (x) 655,957 FCFA=1311,914 FCFA. Il faut désormais  deux fois plus de FCFA en 2012 pour avoir la même quantité d’euros.

Cette mesure qui est purement politique a d’énormes conséquences sur la vie micro et macro des pays.

Analysons d’abord les conséquences micro économiques c'est-à-dire les effets sociaux.

La première conséquence à l’échelle micro est l’inflation. Nous savons tous  que dans nos pays, la plupart des produits sont importés. Au Tchad, Nous importons tout de la boite allumette aux emballages en passant par les matériaux de construction, de guerre. Or, ces produits sont achetés en monnaie étrangères internationale (dollar US ou Euro). Mais comme l’euro garantit la convertibilité du FCFA, on peut retenir euro comme notre monnaie de transaction dans le reste du monde. En d’autres termes, le portable mobile que j’achète jusqu’ici à 50 000 FCFA c'est-à-dire 76 euro coutera en 2012  toujours 76 euros mais mon salaire étant en FCFA, je dois le convertir en euro pour avoir ce portable, il va alors me couter 2(x)50000=100 000 FCFA.

 

Cela veut dire qu’avec un même niveau de salaire, un produit me coute 2 fois plus cher après la dévaluation que s’il est acheté avant la dévaluation. Cette inflation n’est pas intrinsèquement liée à la production ou au produit mais elle est causée uniquement par le changement du taux de change entre le CFA et Euro. Elle est donc artificielle.

 

 Toujours au niveau micro économique, l’objectif d’une dévaluation est de rendre les produits d’exportations plus compétitifs, pour soulager les paysans par un effet multiplicatif de production en volume. L’idée qui se cache derrière cet instrument est que si le kilo du coton grain se vend à 200 FCFA (0,30 euros)  avant la dévaluation, cette même quantité coutera après la dévaluation   200FCFA mais 0,15 euros. Comme ce sont les prix euros qui sont considérés sur le marché mondial, le coton  tchadien sera compétitif car le prix passe de 0,30 à 0,15 euros et donc, il y aura beaucoup d’acheteurs et les paysans africains écouleront rapidement leu production et seront disposés à accroitre leur superficie de culture de coton. Leurs revenus vont augmenter. Ce qui ne se dit pas à haute voix, au même moment où les productions se vendent bien, les intrants importés (engrais, charrue, charrettes) voient les prix doublés avec la dévaluation et annuelle carrément les effets positifs des exportations. D’ailleurs, au Tchad, la filière coton est à l’agonie et ce n’est pas certainement une mesure de dévaluation qui peut la remettre debout.

Troisièmement, les investisseurs tchadiens ou étrangers au Tchad qui ont cumulé des prêts en euro avant la dévaluation, voient leurs engagements doublés du jour au lendemain suite à la dévaluation. En effet, quand un entrepreneur tchadien contracte des prêts auprès de CITI BANK, il le fait en monnaie internationale et doit rembourser en monnaie internationale aussi bien le principal que les intérêts. Mais comme l’entrepreneur opère chez lui en zone CFA, il lui fout le double de ces recettes avant la dévaluation pour faire face à ces engagements après la dévaluation.

 

Sur le plan Macro, toute dévaluation, quelque soit sa réussite, aggrave le solde commercial à ses débuts avant que la tendance à la normale et à l’excédent ne prenne le dessus deux ans ou trois plus tard. En effet, le solde commercial est la différence entre les recettes des exportations et la valeur des importations. Quad il y a dévaluation, immédiatement, les importations s’envolent car la mesure est immédiatement applicable dans le monde entier. Pendant ce temps, les exportations prennent lentement l’envol car il faut augmenter les capacités de production, renforcer les capacités des exportateurs. Telles sont des opérations qui prennent du temps et donc les importations resteront supérieurs aux exportations pendant un temps plus ou moins long selon le degré de préparation de chaque pays à cette opération de dévaluation.

Alors, pour le Tchad, il faut être naïf de penser qu’une dévaluation du fcfa va augmenter la production en volume du coton, de la gomme arabique ou je ne sais de quel produit d’exportation. Elle va au contraire assommer  des secteurs dont les acteurs sont à plus de 80% pauvres.

Tout comme au niveau micro, les dettes bilatérales et multilatérales de l’Etat s’amplifieront et compromettront indéniablement le bien être des générations futures. La dévaluation du FCFA en 1994 est là pour mettre en exergue le poids de dette, même si de fois, il existe des mesures  d’accompagnement ou d’annulation des dettes

 

Tout lecteur attentif se posera la question de savoir pourquoi faire la dévaluation alors qu’il y a tant d’inconvénients ? la réponse est simple. La dévaluation du FCFA se fait par la seule volonté de la France. Souvenez-vous le 11 janvier 1994, quand on dévaluait le FCFA à Dakar. Beaucoup de nos chefs d’Etat n’étaient pas même pas informés de la mesure qui sera prise. Ils l’ont apprise dans la salle de conférence le jour de décision. Quel mépris ! de tous les chefs d’Etats, il y avait les présidents ivoirien et sénégalais seuls qui étaient associés à la manœuvre préparatoire de la France.  C’est vrai que pour qu’une mesure de dévaluation réussisse, il faut un effet de surprise. Sinon les populations et les entreprises de la zone dévaluée placeront leurs stocks en devise et les rapatrieront après l’opération. Ils en sortent ainsi plus riches qu’avant. D’ailleurs, beaucoup de personnes rusées ont eu à le faire en 1994.

 

La dévaluation du Fcfa ne profite qu’à la France et aux pays occidentaux. Leurs actifs se multiplient et leur force monétaire dans les territoires de la zone Franc s’accroit de manière énorme.  100 euros permettent à un français d’acheter le double de biens qu’il achetait avec la même somme avant la dévaluation.

 

Au delà de la question de la dévaluation du FCFA, je voudrais revenir au taux de change fixe du Fcfa avec euro et à la question des réserves logées au Trésor français. Je pense que les pays africains de la zone franc doivent avoir tous honte de continuer à confier leurs réserves à l’Etat français. Sommes nous toujours des enfants, incapables de gérer nous-mêmes nos sous pour les confier à un tiers ? soyons sérieux et réclamons notre indépendance financière. Certes, il y a aura des trébuchements au début de la saison mais c’est au bout de ces trébuchement que naitra la rigueur et la sagesse. Tel un enfant qui apprend à marcher, c’est en tombant plusieurs fois et en se relevant chaque fois qu’il parvient  maitriser la marche. Chers dirigeants africains, apprenons à gérer nous-mêmes nos ressources et de nos chutes, naitront notre habileté. Pouvez vous imaginer un seul instant avec toutes les difficultés financières et économiques que la France a actuellement, elle va gérer nos avoir pour l’intérêt des africains ?  la France n’a pas d’amis, elle n’a que désintérêts à défendre. Le General De Gaulle l’a dit hier mais cela reste encore valable aujourd’hui et le sera aussi demain.

 

Avions nous déjà fait le bilan de la dévaluation du FCFA de 1994 avent de songer à une autre dévaluation ? si oui, quel a été l’impact social, économique ou culturel ?

Je demeure convaincu que sans une indépendance monétaire, l’indépendance économique et politique n’est qu’un leurre.

Et ceux qui souffrent plus des mesures de dévaluations, sont les populations et elles doivent se préparer à empêcher par tous les moyens une nouvelle mesure de dévaluation du FCFA. De leurs comportements dépendra leur survie.

 


 

 Daniel Hongramngaye

hongramngaye@yahoo.fr