Afrique de l'Ouest fragilisée: la RADHO préoccupée !
Déclaration
Fragilisation des Etats et des démocraties, instabilité et menace globale sur la paix et la sécurité en en
Afrique de l’ouest
La Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) est fortement préoccupée par la dégradation, la régression voire la faillite des institutions démocratiques de certains pays de la
CEDEAO et qui constituent une menace sérieuse pour la paix, la sécurité et la stabilité de la sous région. A peine a- t- on connu un retour fragile de la paix en Côte d’Ivoire que plusieurs pays
de la sous région se signalent ces derniers temps par des processus électoraux caractérisés par une violence préélectorale inhabituelle(Sénégal) ou simplement par la
rupture des institutions démocratiques qui sonne comme la chute brutale d’ une ascension démocratique(Mali) :
- Au Sénégal, où la validation par le Conseil
Constitutionnel de la candidature contestée du Président Abdoulaye Wade et l’impuissance de la CENA à faire appliquer la Loi électorale campagne électorale ont constitué des contentieux lourds
qui ont suscité une violence inhabituelle ayant provoqué onze morts et 534 blessés. Contre toute attente le scrutin s’est quand même déroulé de manière
juste, pacifique et transparente. En dépit d’une campagne du 2ème tour qui se déroule de façon relativement pacifique, on est cependant préoccupé
par l’énormité de la corruption électorale et de l’achat des consciences, la démonstration de force« Thiantacounes » avec leurs gourdins mais aussi le recours récurrents à des thèmes
qui volent au bas des pâquerettes naines.
-
Au Mali des
militaires du camp de Kati (à 15 Km de Bamako), en colère contre le manque de moyens, la corruption des officiers supérieurs, les détournements de fonds et tout particulièrement la mauvaise
gestion du conflit au Nord Mali se sont mutés le 21 mars 2012. Déclenché depuis le mois de janvier ce conflit du nord Mali est la conséquence logique du
conflit armé Libyen auquel beaucoup de Touaregs ont participé et sont repartis lourdement armés. Ce qui leur a permis de s’emparer de quelques uns des garnisons du Nord Mali grâce à l’aide de
Aqmi.
Ce coup d’état, dirigé par le Capitaine Amadou Haya Sanago et le Lieutenant Amadou Konaré fondateurs du Comité National pour le Redressement
de la Démocratie et de l’Etat de Droit (CNRDR), vient mettre brutalement un terme au processus électoral et référendaire du 29 avril. Plusieurs ministres ont
été arrêtés dont le Premier Ministre Mariam Kaidama Sibibé, Soumeylou Boubèye Maiga, Agattam Ag Alhassane et le Général Kafougouna Koné, Ministre de l’administration Territoriale et
des officiers supérieurs du Camp de Gao qui préparaient la riposte. Les affrontements entre la garde présidentielle et les mutins ont fait plusieurs morts
dont plusieurs civils, le Président Amadou Toumani Touré serait exfiltré et refugié à l’Ambassade des Etats Unis à Bamako.
Il faut tout de même souligner la légèreté avec laquelle ce conflit datant de 1963, a été géré par le Président Amadou Toumani Touré depuis
qu’il est au pouvoir en divisant les différentes tribus touaregs du nord ; il faut souligner également l’exclusivité de la médiation de l’Algérie dans ce conflit.
L’attitude trop attentiste de la CEDEAO, de l’UA et de la Communauté internationale dans sa globalité n’a pas été également sans impact dans la situation actuelle du
Mali.
Ce coup d’état ajoute à la confusion et à la complexité de la situation au Mali avec l’ajournement des élections, la suspension des
institutions de la république et la dissolution de la Constitution.
- Cas de la Guinée Bissau : instabilité politique chronique et
pathologique, avec les assassinats récurrents des chefs d’Etat et des Chefs d’Etat Major Général de l’armée. De tous les chefs d’Etat élus seul Malam Bacai Sagha, dernier
Président de la République en exercice a quitté le pouvoir pour cause de mort naturelle, tous les autres ont fait l’objet de coup d’état ou d’assassinat politique. Aucun chef d’Etat ne peut
gouverner sans l’accord du Chef d’Etat Major des Forces Armées et aucun Chef d’Etat Major des Forces Armées ne peut rester sans l’accord du Chef de l’Etat ; c’est un pays où la compétition
entre la légitimité politique et la légitimé du militaire (ancien combattant) se termine souvent de façon violente et tragique.
Voilà un pays qui compte le plus d’élections en Afrique de l’ouest et peut être même sur le continent africain où les opérations électorales
se déroulent de façon remarquable et sont bien maîtrisées par les citoyens, pays également où les élections se déroulent de façon juste et transparente. La présidentielle du 18 mars 2012 ne
déroge à la règle, les observateurs s’accordent à reconnaître que les élections se sont déroulées de façon juste et libre et transparentes malgré la constatation de quelques dysfonctionnements et
incidents isolés.
Sur les neuf (9) candidats, huit (8) rejettent les résultats y compris l’ancien Président Kumba Yala
qui, avec ses 23, 36 % , doit ,en principe ,affronter au second tour l’ancien Premier Ministre Carlos Gomez Junior dit Cadogo. Apparemment Kumba Yala qui rejette les résultats ne semble
pas prêt à aller au 2ème tour . A cette incertitude, s’ajoutent des événements tragiques comme la mort de l’ancien Directeur de la Sureté Nationale le Colonel
Samba Diallo(proche de Cadogo et bien informé des assassinats politiques), lâchement assassiné le soir du scrutin du 1er tour, le 18 mars 2012 ;
assassinat certainement lié à tout ce qu’il sait sur les assassinats politiques les plus récents de Guinée Bissau notamment ceux de Joao Bernardo Nino Vieira, le Général Tagme Nawai et Baciru Dabo. Pire, à cela
s’ajoute à l’heure actuelle les relations exécrables entre le Premier Ministre Carlos Gomez Junior et Antoni Ndjaie
Chef d’Etat Major des Forces Armées.
Conclusions et recommandations
On doit absolument tenir compte de la géopolitique fragile, instable et remplie de menaces de toute nature pour assurer le
succès le plus total au scrutin du 2ème tour présidentiel du dimanche 25 mars. Le Sénégal doit absolument transformer, l’essai du scrutin du 26 février dernier pour
constituer la marque et la boussole démocratique d’une sous région en perte de leadership et où les repères sont brouillés.
La Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) :
1.
Appelle tous les citoyens sénégalais à
retirer leurs cartes pour ceux qui ne l’ont pas encore fait et à se rendre massivement aux urnes pour voter dignement et pacifiquement pour le candidat de leur choix, à rejeter avec force toute
corruption électorale, tout achat de conscience et à rester vigilants pour que la volonté populaire clairement exprimée, soit respectée ;
2.
Aux candidats de
faire preuve de fairplay en acceptant les résultats si le scrutin est libre, juste, transparent et démocratique : que le vainqueur fasse preuve d’humilité et que le vaincu félicite son
homologue pour que la démocratie sénégalaise sorte grandie de cette épreuve.
3.
Aux autorités chargées de la régulation et du scrutin à faire preuve de neutralité
Mali
La Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) :
1. Condamne avec la dernière énergie le coup d’Etat militaire qui porte un coup mortel à
l’expérience démocratique malienne originale, intéressante et prometteuse, acquise par la lutte et au prix du sang ;
2. Invite les membres de la junte militaire
à organiser dans les meilleurs délais des élections restaurant l’ordre constitutionnel et à retourner immédiatement dans leurs casernes ;
3. Demande la libération immédiate et sans condition de toutes les
personnes arbitrairement détenues,
4. Appelle la CEDEAO, l’Union Africaine et la Communauté
Internationale à apporter leur soutien au Mali.
Guinée Bissau
La Rencontre Africaine pour la Défense des Droits de l’Homme (RADDHO) :
1. Recommande la tenue de l’élection présidentielle du deuxième tour dans des conditions
transparentes, justes, libres et pacifiques ;
2. Invite solennellement le Président Kumba Yala à
participer au deuxième tour des élections ;
3. Invite la CEDEAO, les pays lusophones (CPLP) et l’Union Africaine
à envoyer immédiatement une mission de paix pour faciliter le dialogue entre les candidats et entre le Premier Ministre Carlos Gomez Junior dit Cadogo et
Chef d’Etat Major des Forces Armées Antoni Ndjaie
Fait à Dakar le 22 Mars 2012
Le Président
Alioune Tine