Abdelwahid Aboud:"Nous demandons à la France et aux USA d'observer une stricte neutralité"
Entretien avec M. Abdelwahid Aboud Makaye, leader de l’UFDD/F et 2ème Vice-président de l’UFR.
Abdelwahid Aboud Makaye, leader de l’UFDD/F et 2ème vice-président de l’Union des Forces de la Résistance (UFR), principale, rébellion tchadienne,revient sur la foi mauvaise foi du régime d’Idriss Deby qui ne joue pas franc-jeu dans la normalisation des relations avec le Soudan et les perspectives de reprise des activités militaires au Tchad.
Interview
Blogmak : Bonjour M. Abdelwahid Aboud ! Depuis quatre (4) ans, vous êtes en
exil, quel bilan faites-vous de la normalisation des relations entre le Tchad et le Soudan ?
-Abdelwahid : Pour moi, je trouve que les relations entre le Tchad et le Soudan sont des relations de circonstance, qui ont pour motivation de
barrer le chemin aux rebelles de part et d'autre. Les soudanais étaient de bonne foi, mais la réciprocité de l'autre coté c'est-à-dire du Tchad, n’a pas été honorée. Car c'est sur cette base que
le président de l'UFR se trouve actuellement à Doha au Qatar, mais hélas. Je retiens la mauvaise volonté du pouvoir qui veut contraindre les opposants sur sa ligne de conduite.
Nous avons patienté et je dirais plus que la normale. Mais, le comble est que l'arrogance du régime de Deby et ses acolytes continue. Et d'ailleurs, notre cause est au dessus de la normalisation des relations entre ces deux pays, la preuve est que nous résistons encore à la dictature et ses pratiques.
Blogmak : L’opinion publique estime que cette normalisation des relations
entre le régime de Khartoum et celui de N’Djamena, a porté un coup d’arrêt dans les activités des organisations politico-militaires tchadiennes de l’est ? Que diriez-vous ?
-Abdelwahid : Ce coup d'arrêt (que je qualifie de volontaire et de bonne foi pour trouver des solutions pacifiques aux problèmes du
pays…) des activités devraient être logiquement suivies d'une table ronde inclusive de chaque partie avec ses politico-militaires. Le Soudan l'avait fait avec beaucoup de détermination, mais
le régime de N’djamena après une première rencontre a boudé et croit qu'après le désarmement, il est inutile de négocier avec les rebelles...Mais, il s'est trompé largement, tant que la dictature
continue, notre combat devient de plus en plus légitime pour tous. Comme nous avons volontairement suspendu nos activités, nous le reprendrons quand on le veut, incha-allah.
Blogmak : Le printemps arabe, qui a commencé en Tunisie, a eu raison sur les
régimes autoritaires d’Afrique du nord. En Afrique noire en général et au Tchad, en particulier, le régime d’Idriss Deby est sur place. Comment expliquez-vous ces difficultés rencontrées
par ces peuples de faire partir leurs dirigeants ?
-Abdelwahid : Ces régimes des dirigeants africains tels qu’Idriss Deby Itno et autre ne veulent pas
pacifier leur pays. Sinon, comment expliquez-vous qu'un régime tire à balles réelles sur des femmes qui sont manifestent leur mécontentement par voie pacifique. Il n'y a qu'au Tchad, où il y a
des gens comme ceux du régime de Deby qui peuvent le faire. Donc, comme Deby l'a toujours dit à qui veux l’entendre que « je ne quitte pas le pouvoir que par la force », alors la
force, il y aura un jour comme il le souhaite.
-Blogmak : Idriss Deby a envoyé son armée tchadienne
combattre les Djihadistes au Mali. Que vous inspire de cette intervention des troupes tchadiennes hors de ses frontières ?
-Abdelwahid
: Les troupes tchadiennes envoyées ne sont pas de l'Armée Nationale, c'est une milice à la solde de Deby. Pour nous, nos troupes ne peuvent quitter leur sol que sous l’égide de l'ONU ou de l'UA.
Mais comme elles sont déjà sur place, nous louons leur bravoure et leur témérité, nous en sommes fiers parce que c'est le tchadien et vue l’urgence de la mission.
-Blogmak : Le régime de François Bozizé vient d’être chassé facilement par la Séléka. Est-il est
possible pour les mouvements d’opposition armée tchadienne de rééditer l’exploit des rebelles centrafricains ?
-Abdelwahid : Nous avons mis en déroute la milice de Deby à plusieurs reprises, mais la défaite cuisante est celle du 02 février 2008 que nul ne saurait ignorer.
Elle a marque l’histoire du Tchad, mais c'est par l'égoïsme du dirigeant de l'époque que nous avons quittée la capitale...sinon, c’était la fin de ce régime. Mais, il faut noter que nous sommes
aujourd'hui encore plus conscientisés, plus aguerris, plus déterminés à le faire de la manière la plus redoutable.
-Blogmak : Que pensez-vous en tant que 3ème personnalité de l’Union des Forces de la Résistance
(UFR), de la déclaration faite, il y a quelques jours par le président Timan Erdimi de relancer les hostilités militaires contre le régime d’Idriss Deby ?
-Abdelwahid : Je suis bien sur de cet avis, car nous sommes à la fin de notre hibernation et nous devons maintenant donner le coup d'envoi à nos
vaillants combattants de se regrouper aux points indiqués pour d'éventuelles opérations militaires. Les camarades résistants à la dictature n'attendent que nos signaux pour le démarrage
effectif de la lutte contre l’arbitraire. Les jours qui suivent seront riches en événement, incha-allah…
Blogmak : Sans soutien extérieur et international, l’UFR a-t-elle les moyens
de ses ambitions militaires et politiques ?
-Abdelwahid : Le soutien il y a toujours, car notre cause est noble. Mais pour le commencement, nous disposons de l'essentiel tout comme
n'importe quel rebelle doit être proactive. Nous avons pris nos précautions dès le départ. Des armes, nous pouvons aussi déterrées celles que Idriss Deby (rire, il se rappelle même pas de
l’endroit où il a enfoui les armes…) aurait caché dans le désert soudanais pendant sa marche vers N'Djamena en 1990...
-Blogmak : Lassés du régime actuel, les Tchadiens souhaitent vivement le
changement au Tchad. Pensez-vous que l’option armée, reste-t-elle d’actualité ?
-Abdelwahid : Il n y a pas d'autre choix, car à défaut d'une solution pacifique souhaitée par tout le monde, et rejetée uniquement par le
régime fantoche de Deby, la lutte armée restera l'ultime et l'unique façon de changer radicalement la dictature qui ronge le pays afin d'instaurer un état de droit plus démocratique où les
libertés fondamentales seront respectées et où la bonne gouvernance sera la principale ligne de conduite des affaires de l’Etat et de la gestion de la chose publique.
-Blogmak : Acteur majeur et partenaire historique du Tchad, la France reste incontournable dans le
changement politique dans ce pays. Pensez-vous qu’il serait possible de changer Deby sans elle ?
-Abdelwahid : Bien sûr que oui. La France est et restera un partenaire historique et privilégiée du peuple tchadien. Je profite de cette
opportunité pour dire aux présidents français et américains de conseiller le régime de N’Djamena d'aller vers des négociations et ou de garder leur neutralité quand nous marcherons sur N'djamena,
très bientôt incha-allah !
-Blogmak : Quel est votre message au peuple tchadien ?
Abdelwahid :
Peuple Tchadien brave, honorable et charitable, nous sommes ton espoir, ton printemps vers un changement du calvaire dans lequel tu t'y trouves, car seul le changement est permanent. Nous
resterons fidèles à nos principes, par l'instauration de la légalité, de la justice et d’une démocratie réelle.
A bientôt
Merci Makaila.
Propos recueilli par Makaila Nguebla à Tunis