Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Alerte Info: Les autorités tchadiennes doivent s'investir pour assurer la sécurité des populations et garantir la paix civile à tous //

Archives

Publié par Mak

Tchad: interview exclusive de Saleh Kebzabo avec la journaliste Sana Sbouai

Saleh Kebzabo, opposant à Idriss Déby, candidat de l’Union nationale pour le développement et le renouveau aux présidentielles, répond aux questions de 54 États sur la situation au Tchad, alors que les résultats du vote du 10 avril ne sont toujours pas connus, que des leaders de la société civile ont été condamnés à des peines de prison et que des militaires qui auraient voté contre le président, au pouvoir depuis 25 ans, sont portés disparus.

 

54 États : Quelle est la situation actuelle au Tchad?

Saleh Kebzabo ( S. K.) : Nous attendons la proclamation des résultats. Le climat est tendu. Nous attendons les résultats de la CENI, qui a reçu instruction de proclamer Idriss Déby vainqueur dés le premier tour. En fait il a peur du 2nd tour. Voilà pourquoi nous assistons à des manoeuvres et manigances. Mais en réalité cette élection ne nous appartient pas, le résultat ne nous appartient pas. Tout cela appartient à la jeune génération. Les jeunes entre 18 et 40 ans représentent 2/3 des votants. Aujourd’hui c’est une génération de laissés-pour-compte, sans avenir, abandonnés, des diplômés sans emploi. C’est pour cela qu’ils ont massivement participé aux élections et qu’il risque d’y avoir des manifestations, dont il ne faudra pas s’étonner. Les jeunes sont libres de réagir comme ils le souhaitent.

54 États : Qu’avez-vous pensez des arrestations et des peines de prison prononcées à l’encontre des leaders de la société civile ?

S.K. : C’est un exemple du fait que le pays est à la dérive. La justice a perdu son indépendance. Les magistrats sont corrompus. La condamnation des syndicalistes et leaders de la société civile est une atteinte à la Constitution. Ce texte suprême garantit les libertés individuelles et collectives. Or demander à un citoyen, un militant ou un syndicaliste de ne pas s’exprimer ou manifester, c’est une atteinte à la Constitution. Et les juges eux-mêmes sont tombés dans ce piège.

54 États : Quelle est votre réaction suite aux informations parlant de la disparition de dizaines de militaires ?

S.K. : Le vote est organisé de manière à permettre aux agents de sécurité de voter un jour plus tôt, soit le 9 avril, pour pouvoir organiser la sécurité le jour du vote. Or c’est une mascarade. Quand on rentre dans l’isoloir et qu’on reçoit des instructions, quand des instructions de vote sont données la veille, c’est une atteinte au secret du vote, c’est une atteinte à la conscience collective. Suite au vote, de nombreux militaires ont été arrêtés, torturés, humiliés, emprisonnés. Certains sont encore portés disparus. Des pères de famille cherchent encore leur enfant. Sont-ils emprisonnés dans une prison secrète dans le palais présidentiel ? Certains militaires, qui ont été relâchés, ont rapporté des témoignages de violence. Quatre corps de militaires battus à mort ont également été retrouvés. Je pense que les familles doivent porter plainte, y compris auprès de la Cours africaine des droits de l’homme et qu’il ait nécessaire qu’une commission d’enquête indépendante établisse ce qui c’est passé le 9 avril exactement.

54 États : Ne craignez-vous pas que l’implication du Tchad dans la lutte contre le terrorisme ne vous prive d’un appui international ?

S.K. : Le terrorisme est un phénomène mondial. Nous luttons contre Boko Haram, contre AQMI, mais ça ne doit pas donner des avantages positifs à Déby. Il a envoyé des troupes un peu partout sur les terrains d’opération. Ce sont les enfants tchadiens qui sont envoyés, en étant sous-payés, mais qui rapportent de l’argent à l’État. Mais il ne faut pas oublier que la lutte contre le terrorisme c’est avant tout une question de renseignement. Par ailleurs nous pensons que nous ( Ndlr : l’opposition) sommes beaucoup plus fiables pour les Français ou les Américains que Idriss Déby, et ils doivent encore le voir actuellement. Nous avons à faire à des pays qui ont des intérêts à défendre, pas des amis.

 

http://www.54etats.com/actus/article/tchad-lopposant-saleh-kebzabo-denonce-une-mascarade-2747/